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Attention ! Le genre des rimes n'a rien à voir avec le genre grammatical !
Ce qui est difficile, dans la question du genre des rimes, c'est qu'il s'agit de "rimes" visuelles ; ce sont des "lois" purement graphiques. Le terme "rime" est trompeur, car on s'attend à ce que cette loi porte sur un son, sur quelque chose que l'on entend.
1. Rime masculine
Tout vers se terminant par une lettre autre que "e" porte une "rime" MASCULINE (sauf exceptions)
Par exemple :
Vous estes en des lieux où les champs tousjours vers, Pource qu'ils n'ont jamais que de tièdes hyvers...(François Malherbe, A Madame de princesse douairière Charlotte de la Trimouille)
2. Rime féminine
tout vers se terminant par un "e" (suivi ou non des terminaisons -s ou -nt) porte une "rime" FEMININE. Bien entendu, si le dernier mot du vers se termine par un -ent se prononçant de manière nasale comme dans "vent", il sera considéré comme une rime masculine.
Exemple de rimes féminines où le E n'est pas graphiquement la dernière lettre (on note l'absence d'alternance) :
Au matin, bien reposée, Tu fuis, rieuse, et tu cueilles Les muguets blancs, dont les feuilles Ont des perles de rosée.(Charles Cros, Vision)
3. Le rôle du "e muet"
Pour comprendre à quoi correspond le E muet, on peut prendre l'exemple du verbe "manger" dont la conjugaison au présent est - à l'oral - assez uniforme : Je mange, tu manges, il mange, ils mangent : quand on le prononce, on entend toujours le même son final qui est un "j" et non un "eu" comme dans "feu". Les E finaux, suivis ou non de -s ou -nt sont donc des e muets (dits aussi e caducs). Et toutes ces terminaisons du verbe manger au présent sont donc des rimes féminines si elles sont placées en fin de vers (donc, à la rime), et ce malgré la présence du -s et du -nt.
De plus, les participes passés féminins "mangée" et "mangées" sont aussi des rimes féminines du fait de la présence finale du -e caduc (le dernier son prononcé est bien un é et non un "eu").
Quoy donc, grande princesse, en la terre adorée, Et que mesme le ciel est contraint d'admirer, Vous avez résolu de nous voir demeurer En une obscurité d'éternelle durée?(François Malherbe, A Madame de princesse douairière Charlotte de la Trimouille)
4. Exceptions
Pour compliquer le tout, certaines formes verbales font exception. En effet, sont considérées comme des rimes masculines les deux formes du subjonctif qu'ils "aient" et qu'ils "soient", ainsi que toutes les formes du conditionnel et de l'imparfait en -aient (ils mangeraient, ils mangeaient), malgré la présence de "e" muet devant "nt" ! Il faut bien identifer ces temps, car les terminaisons en -aient des autres temps seront considérées comme féminines !
5. Alternance des rimes
Dans toutes les formes "traditionnelles" de poésie (le sonnet par exemple), les rimes sont organisées selon un principe d'alternance entre rime féminine et rime masculine.
- Dans le cas de rimes alternées (ABAB), ce sera : rimes masculine / féminine / masculine / féminine
- Dans le cas de rimes embrassées (ABBA), ce sera : rimes masculine / féminine / féminine / masculine
Exemple :
"Dans un mois, dans un an, comment souffrirons-nous, Seigneur, que tant de mers me séparent de vous ? (rime masculine) Que le jour recommence, et que le jour finisse, Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice... (rime féminine)(Jean Racine, Bérénice, Acte IV, scène 5)
Cette règle de l'alternance des rimes féminines et masculines est apparue en France au cours des XIIe et XIIIe siècles, alors que les E finaux étaient prononcés (comme aujourd'hui dans le Sud de la France). C'est le poète Jean Molinet, à la fin du XVe siècle qui énonce cette loi (le E final étant encore prononcé), laquelle est ensuite reprise par les poètes de le Pléiade (Ronsard, Du Bellay and Co.) qui la recommandent. C'est Malherbe, au début du XVIIe siècle, alors que le e final ne se prononce plus, qui l'érige en loi. Elle est respectée jusqu'au milieu du XIXe siècle.
Que le soleil est beau quand tout frais il se lève, Comme une explosion nous lançant son bonjour ! - Bienheureux celui-là qui peut avec amour Saluer son coucher plus glorieux qu'un rêve !(Charles Baudelaire, Le coucher du soleil romantique)
Et je chantais cette romance (F) En 1903 sans savoir (M) Que mon amour à la semblance (F) Du beau Phénix s'il meurt un soir (M) Le matin voit sa renaissance. (F)(Guillaume Apollinaire,La Chanson du Mal-Aimé)
Paul Valery, dans son poème La fileuse, n'utilise que des rimes féminines.
6. Rime approximative = Rime imparfaite
Les poètes modernes, à commencer par les symbolistes, tentent de bouleverser les règles classiques de rime, soit en y renonçant totalement soit en pratiquant la rime approximative. Celle-ci autorise à rimer
- le singulier avec le pluriel. Par exemple :
Mon verre est plein d'un vin trembleur comme une flamme Écoutez la chanson lente d'un batelier Qui raconte avoir vu sous la lune sept femmes Tordre leurs cheveux verts et longs jusqu'à leurs pieds.
(Guillaume Apollinaire, Nuit rhénane) - la terminaison masculine avec la terminaison féminine. Par exemple :
Longtemps au pied du perron de La maison où entra la dame Que j'avais suivié pendant deux Bonnes heures à Amsterdam Mes doigts jetèrent des baisers...
(Guillaume Apollinaire, Rosemonde)
On remplace aussi l'alternance rimes masculine/féminine par l'alternance de rimes consonantiques et de rimes vocaliques. La rime consonantique se termine par une consonne phonique et la rime vocalique par une voyelle phonique. Par exemple :
Dans les roseaux, vis-tu, sur un fleuve bleuâtre, Le soir, glisser le front de la pâle Phoebé ? - Elle dort dans son bain et sa gorge d'albâtre, Comme la lune, argente un flot du ciel tombé.(Stéphane Mallarmé, Rêve antique)
7. Exercice : rime féminine ou masculine ?
- S'il n'était pas malade, à coup sûr il essaierait.
- Je déteste les chaussures qu'elles essaient.
- Donne-leur des chaussures afin qu'elles les essaient.
- Il conservait toujours les bas qu'elles essayaient.
Solutions :
- Rime masculine, car "essaierait" est au conditionnel.
- Rime féminine, car "essaient" est au présent de l'indicatif.
- Rime féminine, car "essaient" est au subjonctif.
- Rime masculine, car "essayaient" est à l'imparfait
8. Liens externes
9. Commentaires (7)
Maria je cherche
entre rimes féminines
entre Assassines au pluriel et enracinent verbe conjugué
Quand j’écris pas à pas les syllabes s’enfilent
en perles aliénées par rythmes inhabiles.
Le pied, lui, en souffre… Alors le vers se casse
se brise sans éclat. Tout comme la caillasse,
dérange la marche, gêne le pas, agace,
mon faux pied clopine… Blessées mes phalanges
tordues déchaussent, claudiquent, se mélangent
lèsent l’écriture. Quand ma plume se noue,
coupe, casse les pieds aux rimes casse-cou.
Ces plaies de troubadours m’incitent à rétablir
à redresser mes vers, raturer sans faiblir.
Le malheur ou l’embuche
me force à mettre parterre
mon pied, ma voute plantaire.
Le pied traine, je trébuche
sur des règles esthétique
les bases de la métrique…
L’E dur qui s’entend
l’E muet octant,
l’E talon d’Achille
de mon pied d‘argile
L’Élision, l’E potiche
l’Élagué, l’hémistiche
la valse des E brouillés
pour les vers invalidés
colle l’Épine au pied.
Déchausser tout le poème,
à force colle un œdème
aux phalanges estropiées
cal son, cal pieds du pompier.
Poètes en marche lente au final estropiés
refo
nt des ratures pour donner corps aux pieds.
Eric Binder
Bonjour! Vous faites erreur dans votre explication de ce que sont les rimes masculines et féminines. Vous compliquez les choses. Tout d'abord, les rimes sont des sons récurrents, et non des lettres. Il faut donc comprendre qu'une rime féminine est un son consonne. Et dans le cas d'une rime masculine, il s'agit d'un son voyelle. Sans quoi, vous en viendrez à dire que des mots tels que «poire» et «soir», qui riment bel et bien, ne riment pas, car selon votre explication, le premier se termine par un e muet, et pas le second. L'explication qui s'appuie sur le dernier son produit (consonne ou voyelle) s'est généralisée au vingtième siècle grâce, notamment, à la contribution d'Apollinaire et d'Aragon.
Rimes masculines/rimes féminines.
La pertinence de cette distinction, essentielle en versification classique, dépend de la prononciation du français pratiquée par le lecteur à haute voix.
Pour un lecteur qui pratique la prononciation du français dit standard, celle des médias parisiens, celle qui est transcrite en alphabet phonétique dans les dictionnaires, cette distinction n’existe pas. Éric rime avec Amérique parce que Amérique est prononcé Améric. De fait il n’y a plus que des rimes masculines puisque tous les mots sont accentués sur la dernière syllabe prononcée.
Pour le lecteur qui pratique la prononciation méridionale du français il n’en est pas de même. Éric est une vraie rime masculine, puisque le mot est accentué sur la dernière syllabe, alors que Amérique est une vraie rime féminine puisque, le e final étant prononcé, le mot est accentué sur l’avant-dernière syllabe.
La prononciation du français standard détruit une opposition entre les rimes qui est pourtant un des outils les plus expressifs de la versification. Exemple :
La jeune esclave
Les rayons s’épanchant au travers de la treille
Dessinent sur le mur de multiples soleils,
Et les seins de l’esclave, aux mamelons vermeils,
Frémissent dans le vent qui parle à son oreille.
Elle vient au jardin sitôt qu’elle s’éveille,
Triste égaiement offert aux jours toujours pareils.
Combien de soirs comptés et combien de réveils
Perdus, pour cette enfant que l’eunuque surveille ?
Le mur est bien trop haut et le ciel bien trop nu,
Et l’au-delà du mur un trop vaste inconnu
Pour laisser dans son âme entrer quelque espérance.
Un souvenir la brûle, et prompte à l’apaiser,
Sur sa joue une larme a posé son baiser
Comme un baume hérité de sa lointaine errance.
Dans ce sonnet la prononciation standard donne la même rime eil aux huit vers des deux quatrains (la règle de l’S étant négligée). La prononciation méridionale qui distingue nettement eille et eils donne beaucoup plus de charme à ces quatrains.
Pour finir, un souvenir de lycée. Un vieux professeur de lettres classiques nous disait : « Pour bien réciter Racine il faut avoir l’accent marseillais ».
Si une rime se termine par un é est ce que la rime est féminine ? et pareil pour ée ?
Bonjour,
Je souhaiterais avoir un renseignement svp; Je cherche à trouver le nom de certaines rimes, et je ne trouve pas.
Lorsqu'un poème comporte 8 vers, les rimes sont placées de la sorte ABCD DCBA - comment nomment-on ces rimes ?
Ont-elles seulement été identifiées ?
Merci d'avance.
Un verbe au présent de l'indicatif au pluriel peut-il rimer avec un mots à la rime au pluriel
elles tombent
comme des bombes ?